Nous avons choisi ce petit tableau de la jeunesse du peintre, car les chroniqueurs d'art sont parfois indifférents, à notre époque,pour des œuvres marquées par la foi chrétienne : bien sur nous ne savons pas si le peintre avait la foi quand il a peint ce tableau, mais une vraie spiritualité marque cette œuvre et elle nous a paru digne d'être commentée par un observateur chrétien...
Jésus après sa résurrection apparait plusieurs fois à ses disciples... évangéliste St Luc évoque l'une de ces apparitions, celle des Disciples d'Emmaüs souvent prise comme sujet par les peintres et 2 fois par Rembrandt : l'une, la plus conventionnelle, est au Louvre ou le Christ nous fait face avec les traditionnels rayons émanant de sa tête, l'autre est un tableau, poignant dans sa théâtralité juvénile et simple : il est peint sur un panneau sans doute de bois de 39 cms X 42 cms...
Nous sommes dans une auberge très modeste, au fond sur la gauche apportant de la profondeur au tableau la silhouette d'une servante se dessine les mains occupées par ses taches ménagères au dessus, sans doute, d'un évier...
Entre le second plan et le 3 ème une table est dressée avec un pain très visible, au second plan au dessous de la besace du voyage, l'un des pèlerins a un net mouvement de recul vers la gauche, il a été surpris par le Christ qui vient de manifester sa présence divine, par cette lumière intense sur le mur, émanant de lui, il est incrédule et lève ses deux mains de stupéfaction: il crée ainsi une diagonale avec son corps qui rejoint le trou d'ombre où est la servante, il est inondé par la lumière qui irradie, non du Christ lui même, mais du mur de vieilles planches et de pierres à sa base, ce mur qui est sublimement nuancé de divers tons de beiges jaunes et de roses très pales qui intensifient et rendent les blancs éclatants, noter que l'épaisseur des planches, sur le haut à droite, est éclairée en ocre jaune par la lumière irradiée par le mur et la présence de Jésus, donnant relief et densité à cette masse de lumière éblouissante...
Le premier plan présente l'un des disciples qui lui, des la transformation du Christ, a compris et n'a pas hésité, il a rejeté violemment sa chaise qui est a terre, il est tombé à genoux aux pieds de Jésus : ce dernier a les mains jointes, il a la tête levée vers le ciel, il est comme une ombre, avec son profil très fortement dessiné sur le fond de lumière...
Procédé du clair-obscur parfaitement maitrisé, instantané narratif certes théâtral, mais donnant une intensité rare à cet épisode ou l'homme rencontré en route se révèle être le fils de Dieu, quelques secondes avant de disparaitre...
Rarement une telle force d'émotion a été obtenu, avec cette économie de moyens visuels et de couleurs, juste ces 2 obliques fictives qui se croisent : celle de la gauche avec le personnage effrayé et à droite celle qui monte depuis celui qui est à genoux, suit le corps de Jésus et part vers les morceaux de planches abimées et dont l'épaisseur est en jaune ocre ouvrant ainsi cet espace de lumiere surnaturelle, l'essentiel du tableau, entre le disciple effrayé, et la masse sombre de Jésus et du disciple prosterné : un petit chef d’œuvre, insuffisamment connu, peint par un génie de 22 ans... Rembrandt poursuivra cet essai reussi de composition et de lumière dramatiques dans ses grandes œuvres jusqu'en 1640.
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